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DES VANNEAUX

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À l'ami Moreu

Fille du peintre et poète russe Georges Odartchenko et peintre elle-même, mais également traductrice, auteur de livres pour enfants, de romans et d'essais, Cécile Odartchenko célèbre ici un peintre du groupe Cobra, aveugle à vingt ans qui a partiellement et par périodes entrecoupées d'opérations, recouvré la vue à partir de ses trente ans , et célèbre à travers lui l'amitié, la Picardie, l'art, la vie terrestre et la matière vivante en ses plus fines et intimes connections: "tu sais la craie et le gravier/et chaque racine/qui prend le sable dans son bouquet/ et le tient en place". Il y a du Bachelard chez  le peintre qui "mâche rêveusement", mais le rêve ne passe pas, "il advient", et l'atelier, dedans  comme dehors, "ne désemplit pas". Des"nouvelles boulettes de vie", toiles, petits bonshommes ou chenilles, "en cheville avec le vaste univers et ses diasporas diaprées",témoignent de "l'infini des complicités". Nés chez Beckett et en Picardie, ce "pays de boue", Pim et Pom touillent fraises, mûres, pâte de coings. Pom éclabousse, tache, dégouline, Pim-Moreu sort de son terrier sans peinture comme la taupe, le lapin, le renard, pour offrir les morilles qu'il fait naître sur sa toile et saupoudre de pouzzolane. Avec ces "chineurs étranges et clochards", Cécile Odartchenko renoue avec une poésie généralisée (vers, prose et peinture, or "tout est peinture", disait Rousselot), capable d'enchanter ou de réenchanter un "monde trop goûteux, trop onctueux, trop fessu et trop sauvage".

François Huglo