Le corps fabuleux du vin
Les vignes sont écrites, à la ronde, pleins gras
et déliés en vrilles, noeuds et volutes, spirales
entre-coupées sur les lignes de leur palissage. Dans ces
taillis horizontaux, l'hiver, se croisent des fers, et des bras,
en X, en V en Y, les ceps poussent leurs cornes, vieux taureaux
et jeunes béliers. Des lyres, des antennes, des diapasons.
Ruptures: il manque des pieds. Et les lettres recommencent à se
suivre, à se ressembler et à ne pas se ressembler.
Portées pour une musique baroque.
Les bois tombés effilent de leur charpente, comme les
branches des pommiers, des courbes espacées, montantes,
côtes de la cage thoracique, armature d'une épave
(la carcasse d'un grand animal dans le désert, galion échoué sur
son or). Mais elle ne parle pas de mort, la chute du trop-plein
des vignes taillées, qui deviendra fagots pour l'entrecôte,
rien de funèbre dans la taille, la belle épure
de l'hiver, saison alchimique, épreuve des quatre éléments,
bain révélateur.
Au printemps, sur les ceps et leurs cornes (les astres recourbées),
les noeuds de jonc, de vime ou de ficelle semblent une délicate
attention, davantage une célébration qu'un souci
de la vendange. Isolé de l'ensemble des opérations
qui visent à améliorer une récolte, considéré en
lui-même, dans sa répétition chaque année
depuis des générations, ...
François Huglo est l'auteur
de plusieurs ouvrages :
Les vignes sont écrites, Saint-Germain des-Prés, 1983
Le trébuchet, Le dé bleu, 1986
Usage commun, Plis, 1987
Nymphoses, Hautécriture, 1990
La langue en herbe, Ecbolade, 1994
Jean Rousselot ou la volonté de mémoire, Le dé bleu, 1995
Métamorphoses du voyageur essai sur la poésie d'André Miguel
Il est aussi un critique
de poésie très apprécié et contribue
régulièrement à la revue Diérèse
François Huglo
Voir
la critique